L'Est Eclair


Grande Guerre/ Un siècle après, Jean-Marie Nicot retrace le parcours de son grand-père

Bar-sur-Aube - Jean-Marie Nicot, petit-fils d’un Poilu, s’efforce de reconstituer les quatre années de guerre de son aïeul tué en juillet 1918.

Le carton dormait depuis de très longues années dans les archives familiales de la sainterie de Vendeuvre. Il y a deux ans, quand Jean-Marie Nicot rouvre le paquet constitué par sa grand-mère, il est submergé par l’émotion. Il contient des centaines de lettres, de documents et, surtout, certains effets personnels de son grand-père, Henri Nicot, mort au front le 20 juillet 1918. Impossible pour le petit-fils, à ce moment-là, d’aller plus loin. Il replace soigneusement les lettres, l’étui à cigarettes encore plein, la petite lampe à huile, la photo du fils de trois ans que son père conservait sur lui… Il y a quelques mois, le petit-fils du Poilu trouve la force d’entamer l’exploration du précieux carton. Pas à pas, lettre après lettre, il s’efforce de reconstituer le fil des quatre années passées au front.
Né en juillet 1885, Henri Nicot a un destin tout tracé. Son père est à la tête de la fabrique de statues de Vendeuvre et, tout naturellement, Henri Nicot prit la suite. Cela intervint plus tôt que prévu, en 1905, à ses 20 ans. L’année suivante, il part au service militaire au premier bataillon de chasseur à pied de Troyes. «  Le 2 août 1914, il est mobilisé pour aller se battre contre l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie et rejoint le 41e  Bataillon de chasseurs à pied. Quelques mois plus tard, en novembre, naît son fils dont il conservera sur lui les photos durant toute la guerre. Il sert toute la guerre comme chasseur téléphoniste, dans les transmissions, dirait-on aujourd’hui  », raconte Jean-Marie Nicot. Les courriers échangés avec Hélène Dauvet qu’il épousa en avril 1910 ou avec ses parents ne donnent que peu de renseignements sur les faits de guerre. Les deux citations à l’ordre du bataillon et celle à l’ordre de la division sont en tout cas élogieuses sur l’implication et l’abnégation du soldat.

Le 22 juillet 1918, le soldat manque à l’appel

«  Finalement, c’est sur les circonstances de sa mort que j’en ai appris le plus, notamment grâce aux écrits d’un autre téléphoniste qui était juste à côté de lui quand il a été fauché par une balle en pleine poitrine  », note Jean-Marie Nicot.
Le 17 juillet 1918, l’ordre est donné de passer à l’offensive à la pointe du jour, le lendemain. Le 18 au matin, le 41e BCP est au centre de la contre-offensive menée dans l’Aisne. Sur sa gauche, se trouvent les Américains, à droite le 152e de ligne français. «  Ils avancent d’une quinzaine de kilomètres en très peu de temps avec des pertes minimes. Mais, à partir de midi et jusqu’à 19 h, ce fut terrible. Le lendemain, l’attaque reprend. Il y avait plusieurs bois avec des nids de mitrailleuses à reprendre. L’une d’elles fauche Henri Nicot alors qu’il tente de se réfugier dans un trou d’obus. C’est d’ailleurs là qu’il sera enterré », raconte son petit-fils.
Le 22 juillet, le soldat manque à l’appel. Et, rapidement, l’information parvient à sa femme. L’aumônier salue notamment la foi, le courage, l’abnégation de celui qui avait été jusque-là si «  miraculeusement protégé au milieu des combats acharnés  ». En même temps qu’il fournit des indications sur le lieu de la sépulture, son sergent décrit «  un brave, celui sur qui on pouvait compter. J’ai perdu un de mes meilleurs amis », écrit-il le 28 juillet 1918.
Rapidement, Hélène Dauvet effectue une demande pour rapatrier la dépouille à Vendeuvre. Le 12 août 1918, l’armée refuse en raison de l’interdiction des exhumations dans la zone. Le 16 septembre 1918, elle obtient tout de même un sauf-conduit pour se rendre sur la tombe. Elle poursuit ses démarches toujours avec le même objectif, une fois l’Armistice signé. Nouveau refus le 8 avril 1920. «  Elle décide alors d’y aller elle-même, le 11 mai 1920. Elle loue un véhicule et se rend sur les lieux avec d’autres personnes. Le corps est ramené et enterré en pleine nuit à 2 h 30 à Vendeuvre. Les autorisations officielles n’arriveront que quelques mois plus tard, en décembre 1920  », indique Jean-Marie Nicot. Plus tard, elle placera tous les documents dans un carton. Un carton qui n’a pas encore livré tous ses secrets.

 Publié le
Par Mathieu GIBET

Source: http://www.lest-eclair.fr/bar-sur-aube/grande-guerre-un-siecle-apres-jean-marie-nicot-retrace-ia0b0n254250



 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire